Ce qu'il faut retenir :
01
En cas de suspicion d’un logement vacant, la première des choses à faire est de mandater
un Commissaire de justice aux fins de lui demander de signifier au locataire une sommation d’avoir à justifier de l’occupation de son local d’habitation.
02
Le Commissaire de justice doit pénétrer dans le logement afin de dresser un procès-verbal de constat d’abandon des lieux.
03
C’est en vertu du procès-verbal de constant d’abandon des lieux que le Juge des contentieux de la protection va autoriser la reprise du logement et, s’il y a lieu, statuer
sur le sort des bien laissés dans les locaux.
04
Les papiers et documents personnels retrouvés sur place sont conservés par le Commissaire de justice pendant 2 ans.
05
Si la procédure de logement vacant n’aboutit pas, le propriétaire des lieux est contraint
de mettre en œuvre la procédure d’expulsion.
Il est des cas dans lesquels le locataire d’un appartement disparait du jour au lendemain, sans
prévenir le bailleur de son intention de quitter les lieux. En telle situation, le bailleur a
l’obligation de s’adresser à une Commissaire de justice, à défaut de quoi il pourra être accusé
de reprise illicite du logement ; de quoi faire engager sa responsabilité.
Jusqu’à peu, la procédure qu’il convenait d’appliquer était longue et coûteuse en ce qu’il fallait
s’en remettre à la procédure d’expulsion judiciaire de droit commun. Toutefois, les choses ont
changé de par l’adoption de la loi Béteille du 22 décembre 2010, laquelle a instauré une
procédure spécialement dédiée aux logements vacants et à la reprise de ces derniers. En
revanche, il convient de préciser qu’une telle procédure accélérée n’est ouverte uniquement
pour les baux d’habitation régis par la loi Mermaz-Malandain du 6 juillet 1989, à l’exception
des baux meublés.
La procédure à suivre
Conformément au premier alinéa de l’article 14-1 de la loi Mermaz-Malandain : « Lorsque des
éléments laissent supposer que le logement est abandonné par ses occupants, le bailleur peut
mettre en demeure le locataire de justifier qu’il occupe le logement ». Ainsi, il apparait que la
première des choses à faire est de mandater un Commissaire de justice aux fins de lui demander
de signifier au locataire une sommation d’avoir à justifier de l’occupation de son local
d’habitation. A cela, il est laissé un délai d’un mois au locataire pour s’exprimer à compter de
la signification, à défaut de quoi le Commissaire de justice est alors autorisé à pénétrer dans le logement afin de dresser un procès-verbal de constat d’abandon des lieux. Dans cet acte, l’officier public et ministériel doit exhaustivement décrire l’état du logement afin de déterminer si l’abandon peut être caractérisé ou non. A ce titre par exemple, seront des indices effectifs le
fait de retrouver le trousseau de clés du logement à l’intérieur de celui-ci, un réfrigérateur vide, voire une boite aux lettres au courrier débordant. Au demeurant, le Commissaire de justice doit
dresser dans le procès-verbal un inventaire des biens laissés sur place ainsi qu’une indication des biens présentant une valeur marchande. A cela, le législateur impose de respecter les articles
L. 142-1 et L. 142-2 du Code des procédures civiles d’exécution, lesquels prévoient qu’en l’absence de l’occupant du local il convient de pénétrer dans le logement accompagné des
personnes expressément prévues à cet effet, mais également d’assurer la fermeture de la porte
d’entrée du logement.
Muni du constat d’abandon des lieux, le bailleur peut légitimement par suite saisir le Juge des contentieux de la protection aux fins d’obtenir une ordonnance prononçant la résiliation du contrat de bail, et l’autorisant par là même à reprendre le logement dont il a la propriété.
Également, l’article 14-1 de la loi Mermaz-Malandain dispose notamment : « Le juge qui constate la résiliation du bail autorise, si nécessaire, la vente aux enchères des biens laissés
sur place et peut déclarer abandonnés les biens non susceptibles d’être vendus ». Ainsi, la saisine du Juge des contentieux de la protection permet en outre de connaître le sort réservé aux
biens laissés dans le logement vacant ; soit vente aux enchères, soit destruction. A préciser que les papiers et documents personnels retrouvés sur place seront conservés par le Commissaire de justice pendant 2 ans. S’il est fait droit à la requête du bailleur, l’ordonnance doit alors être signifiée sous 2 mois au locataire à compter de son prononcé. En revanche, l’article 6 du décret d’application de la loi
Béteille dispose : « Le locataire ou tout occupant de son chef peut former opposition à l’ordonnance.
L’opposition est formée dans un délai d’un mois suivant la signification de l’ordonnance par déclaration remise ou adressée au greffe. L’exécution de l’ordonnance est suspendue pendant le délai d’opposition ainsi qu’en cas d’opposition formée dans ce délai ». Le bailleur lui, en cas de rejet de sa requête, n’a toutefois aucune voie de recours ; il lui faut mettre en œuvre la procédure d’expulsion judiciaire de droit commun. Par suite, à défaut d’opposition, il
appartiendra au Commissaire de justice de procéder à la reprise du logement.
Actualités (mise à jour 2025)
Une question prioritaire de constitutionnalité a récemment été adressée par la Cour de cassation
le 30 mars 2023 (n° 22-21.761) Conseil constitutionnel s’agissant de l’obligation de relogement
du locataire âgé de plus de 65 et disposant de revenus limités. La question était la suivante : « L’article 15 III de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, en ce qu’il impose au bailleur personne
physique qui justifie d’un motif légitime de reprendre son bien pour l’habiter, de proposer à son locataire âgé de plus de 65 ans et ne disposant que de faibles revenus, un logement
correspondant à ses besoins et à ses possibilités dans des limites géographiques déterminées, porte-t-il au droit de propriété consacré à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme
et du citoyen de 1789, une atteinte disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi, compte tenu de l’impossibilité pour le bailleur, lorsque le bail est ancien et que le logement se situe dans une zone où les loyers sont excessivement élevés, de proposer un tel logement, faute qu’il
s’en trouve sur le marché locatif privé ? ». Dans une décision du 27 mai 2023 (n° 2023-1050), le Conseil constitutionnel a affirmé que « les mots « sans qu’un logement correspondant à ses
besoins et à ses possibilités lui soit offert dans les limites géographiques prévues à l’article 13 bis de la loi n° 48-1360 du 1 er septembre 1948 précitée » figurant à la première phrase du premier alinéa du paragraphe III de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 sont conformes à la Constitution ». Par conséquent la réponse à la question posée est négative : les dispositions contestées ne portent pas au droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi.