En matière d’expulsion, différentes juridictions peuvent être saisies et, à l’intérieur même de ces juridictions, différents juges. En effet dans un premier temps, il est possible de saisir le Tribunal judiciaire, soit par voie d’assignation en référé, soit par la même voie au fond. Pour cause, le Tribunal judiciaire étant le tribunal de droit commun, il connait de toutes les affaires civiles et commerciales. Également bien souvent, l’expulsion relève de la compétence du Juge des contentieux de la protection. En effet, l’article L. 213-4-4 du Code de l’organisation judiciaire dispose : « Le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion [..] ». Ainsi, le juge saisi à cette fin devra contrôler la régularité des congés donnés et par suite, ordonner la mise en œuvre de la procédure d’expulsion s’il y a lieu. Ensuite, si l’ordinaire le Juge de l’exécution n’est pas compétent en la matière, par exception celui-ci l’est dans le cadre d’une saisie immobilière. Pour cause, l’article L. 322-13 dispose : « Le jugement d’adjudication constitue un titre d’expulsion à l’encontre du saisi ».
Aussi, le Juge aux affaires familiales peut fonder une procédure d’expulsion à plusieurs escients, notamment lorsqu’il attribue la jouissance du logement du couple en matière de divorce, mais également lorsque celui-ci ordonne l’expulsion du conjoint violent dans le cadre de l’ordonnance de protection. Enfin, s’agissant des autres expulsions ne relevant pas du civil, sont compétents le Conseil des prud’hommes pour prononcer l’expulsion d’un salarié de son logement de fonction, le Tribunal paritaire des baux ruraux en matière de résiliation des baux ruraux, les juridictions administratives pour ordonner l’expulsion des domaines de l’Etat, ou encore le président du Tribunal de commerce pour expulser d’un logement de location-gérance. S’agissant de l’assignation elle-même, il importe pour elle de contenir différentes mentions obligatoires prévues aux articles 54 et 56 du Code des procédures civiles d’exécution, à défaut de quoi la nullité sera prononcée. A ce titre, doivent apparaître la juridiction devant laquelle la demande est portée, l’objet de la demande, les éléments de désignation du demandeur à l’action, les diligences entreprises en vue d’une résolution amiable du litige lorsqu’elle est obligatoire ou à défaut, la justification de la dispense d’une telle tentative, les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée, un exposé des moyens en fait et en droit, l’indication des modalités de comparution devant la juridiction concernée avec la précision que, si l’occupant sans droit ni titre ne comparait pas, il s’expose à ce que soit rendu contre lui un jugement sur les seuls éléments fournis par le demandeur et enfin, la date de l’acte, les nom, prénoms, demeure et signature du Commissaire de justice procédant à sa signification, ainsi que les nom et domicile – ou dénomination et siège social selon le cas – du destinataire de l’acte.
L’article 24 III de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 dispose : « A peine d’irrecevabilité de la demande, l’assignation aux fins de constat de la résiliation est notifiée à la diligence du commissaire de justice au représentant de l’Etat dans le département au moins six semaines avant l’audience, afin qu’il saisisse l’organisme compétent désigné par le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l’offre globale de services d’accompagnement vers et dans le logement prévue à l’article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée. Cette notification s’effectue par voie électronique par l’intermédiaire du système d’information prévu au dernier alinéa de l’article 7-2 de la même loi. La saisine de l’organisme mentionné à la première phrase du présent III peut s’effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret. L’organisme saisi réalise un diagnostic social et financier, selon des modalités et avec un contenu précisés par décret, au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en mesure de présenter leurs observations, et le transmet au juge avant l’audience, ainsi qu’à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ; le cas échéant, les observations écrites des intéressés sont jointes au diagnostic. Le locataire est informé par le représentant de l’Etat dans le département de son droit de demander au juge de lui accorder des délais de paiement, prévu au V du présent article ». Ainsi, l’assignation en expulsion doit être notifiée au préfet, via l’EXPLOC, par le Commissaire de Justice et ce, à peine d’irrecevabilité de la demande. L’EXPLOC a été créé en 2016 et permet la dématérialisation des signalement et des saisines auprès du préfet ou de la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) dans le cadre d’une procédure d’expulsion. Si un arrêté du 12 décembre 2022 a prévu l’abrogation de l’arrêté du 23 juin 2016 portant création de l’EXPLOC, un arrêté du 29 juin 2023 est quant à lui venu reporté au 31 décembre 2023 ladite date d’abrogation prévue à l’origine pour le 30 juin 2023.
Également, très récemment, la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, entrée en vigueur le 29 juillet 2023, est venue modifier l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, enjoignant désormais aux Commissaire de Justice d’effectuer la dénonce de l’assignation en expulsion non plus 2 mois avant la date d’audience mais 6 semaines désormais. Ce choix du législateur est pour le moins cohérent en ce que le commandement de payer visant la clause résolutoire, qui doit également être dénoncée au près, ne laisse plus un délai de paiement de 2 mois au locataire mais bien 6 semaines.