Il est de principe que le droit des biens contient les règles déterminant les droits que les personnes peuvent avoir sur les choses. Ainsi, ce droit permet tant de connaître l’appartenance des biens et la répartition de ceux-ci dans la société, mais également le pouvoir accordé aux personnes sur ces derniers. Conformément à l’article 544 du Code civil : « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Ainsi, si d’ordinaire le droit de propriété a été érigé en droit absolu, il est à préciser cependant que certaines atteintes peuvent y être portées, voire même des atteintes prévues par le législateur lui-même. En effet à ce titre, l’article 2258 dispose quant à lui : « La prescription acquisitive est un moyen d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession sans que celui qui l’allègue soit obligé d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi ». Dès lors, il est légalement possible, pour un possesseur – personne détenant ou jouissant d’une chose – n’étant pourtant pas propriétaire d’un bien mobilier ou immobilier, d’obtenir la propriété de celui-ci en raison seulement de l’écoulement du temps. A cela, il est à préciser toutefois que la possession doit provenir d’une personne semblant être propriétaire, mais ne disposant en réalité d’aucun droit de propriété.
Également appelée « usucapion », la prescription acquisitive est toutefois subordonnée à quelques conditions. En effet, dans un premier temps, ne peuvent être prescrits les biens n’étant pas le commerce, et il appartient au possesseur de justifier d’une possession continue, paisible, publique, non équivoque et ce, à titre de propriétaire. Pour cause, l’article 2266 du Code civil dispose : « Ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais par quelque laps de temps que ce soit. Ainsi, le locataire, le dépositaire, l’usufruitier et tous autres qui détiennent précairement le bien ou le droit du propriétaire ne peuvent le prescrire » – tout comme les héritiers soit dit en passant –. Enfin, il importe que le possesseur ne soit pas privé pendant plus d’une année de la jouissance du bien objet de la possession et ce, que la privation soit du fait du propriétaire lui-même ou d’un tiers.
A cela, qui dit prescription acquisitive, dit délai de prescription. C’est à ce titre que l’article 2272 dispose : « Le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans ». Ainsi, il apparait à la lecture de cette disposition qu’en dépit du délai de 30 ans instaurée, a été mise en place une prescription immobilière abrégée dès lors que le possesseur est en mesure de justifier d’un juste titre – existence d’un acte juridique transférant la propriété de l’immeuble par une personne semblant être propriétaire du bien – et de sa bonne foi – croyance de l’acquéreur de tenir la chose du véritable propriétaire –.
L’intérêt de la prescription acquisitive de propriété
Contrairement à la prescription extinctive qui elle, engendre l’extinction d’un droit en raison de l’inaction de son titulaire pendant un certain temps, la prescription acquisitive permet au possesseur du bien de devenir véritablement et légalement le propriétaire de la chose objet de la possession. En effet, pour faire valoir ce droit, il importe audit possesseur de saisir le Tribunal judiciaire par voie de requête, ainsi que d’apporter l’ensemble des preuves de son juste titre et sa bonne foi au soutien de sa prétention – à préciser ici que la bonne foi se présume –. Une fois la demande acceptée, le possesseur sera aux yeux de tous reconnu propriétaire du bien et ce, du fait de la remise d’un titre de propriété remis à son nom par le juge saisi de l’affaire. Également, la reconnaissance de propriété par le tribunal a un effet rétroactif en ce que le possesseur légalement déclaré propriétaire, sera considéré propriétaire de la chose dès le début de sa possession. Ainsi, l’ensemble des actes passés à son nom seront tenus pour réguliers, et aucun autre litige ne pourra se présenter s’agissant de la propriété du bien.