Ce qu'il faut retenir :
01
Un aéronef est un appareil construit par l’homme capable de grandement s’élever ou de
circuler dans les airs, et dirigeable.
02
La saisie emporte indisponibilité de l’engin volant, la saisie de ses fruits et une
restriction des droits de jouissance et d’administration du débiteur sur ce dernier.
03
Il importe pour le créancier d’être en possession d’un titre exécutoire, mais surtout de
faire signifier par Commissaire de justice un commandement de payer au saisi. A noter
que les significations doivent obligatoirement être faites à personne ou à domicile.
04
Alors que le droit commun des saisies instaure un délai de 8 jours entre la signification
du commandement de payer et la saisi, tel n’est pas le cas pour la saisie des aéronefs ;
il pourra être saisi immédiatement.
Présentation
Régie depuis l’ordonnance du 28 octobre 2010, la saisie des aéronefs revêt une importance
particulière en raison de la valeur de ces biens mobiliers. En effet, il aurait été incompréhensible
de ne pas permettre à un créancier, bénéficiaire du droit de gage général, la saisie d’un appareil
volant afin de recouvrer sa créance alors même que ce bien est gage de richesse et de solvabilité.
Ainsi, le législateur a prévu cette faculté au sein du Code des transports et du Code de l’aviation
civile, sur renvoi de l’article L. 241-1 du Code des procédures civiles d’exécution. Par
définition, conformément à l’article L. 6100-1 du Code des transports : « Est dénommé aéronef
pour l’application du présent code, tout appareil capable de s’élever ou de circuler dans les
airs ». Plus encore, il est de principe qu’un aéronef doit être un appareil construit par l’homme,
capable de grandement s’élever afin d’éviter les éventuels obstacles présents dans les airs, et
dirigeable. A cela, il importe de préciser que l’article XVI de la Convention de Genève du 19
juin 1948 dispose : « Au sens de la présente Convention, l’aéronef comprend la cellule, les
moteurs, hélices, appareils de radio et toutes pièces destinées au service de l’aéronef, qu’elles
fassent corps avec lui ou en soient temporairement séparées ».
L’intérêt de la saisie des aéronefs
La mise en œuvre de la saisie d’un aéronef peut être des plus judicieuses pour un créancier,
d’abord en raison de la valeur monétaire de ce bien qui permet alors un recouvrement effectif
d’une créance élevée. Par suite, il importe de retenir que la saisie emporte indisponibilité de
l’engin volant, la saisie de ses fruits et une restriction des droits de jouissance et
d’administration du débiteur sur ce dernier, conformément à l’article L. 141-2 du Code des
procédures civiles d’exécution qui dispose : « L’acte de saisie rend indisponibles les biens qui
en sont l’objet. Si la saisie porte sur des biens corporels, le débiteur saisi ou le tiers détenteur
entre les mains de qui la saisie a été effectuée est réputé gardien des objets saisis sous les
sanctions prévues par l’article 314-6 du code pénal ». Ainsi, toute cession ou aliénation du bien
saisi est prohibée. Également, il est à retenir que la signification d’un commandement de payer
permet d’interrompre la prescription de la créance litigieuse.
La procédure à suivre
A l’instar de nombreuses autres saisies, il importe pour le créancier d’être en possession d’un
titre exécutoire, mais surtout de faire signifier par Commissaire de justice un commandement
de payer au saisi, conformément à l’article R. 123-2 du Code de l’aviation civile. Ici, il est
néanmoins à préciser que le législateur n’autorise que la signification à personne ou à domicile,
la signification par voie de dépôt étude étant exclue. Également, à la lecture du même article, il
apparait qu’aucun délai n’est institué entre le moment de la signification du commandement et
celui de la saisie. Ainsi, la saisie des aéronefs est des plus célères en ce qu’elle peut être
pratiquée immédiatement. S’agissant du procès-verbal de saisie, il importe que celui-ci
comporte toutes les mentions exigées – informations sur l’identité et la représentation du
créancier poursuivant, indication du titre exécutoire, montant de la créance, nom du débiteur,
éléments caractéristiques et immatriculation de l’aéronef objet de la saisie, description de ce
dernier et désignation d’un gardien –, en sus de celles prévues à l’article 648 du Code de procédure civile. Par suite, sous 5 jours la copie de cet acte dressé par Commissaire de justice
doit être notifiée au débiteur, tout comme la citation en justice. La transcription du procès-verbal
de saisie se fait ensuite sous 5 jours encore au bureau chargé de la tenue du registre
d’immatriculation, soit à la Direction générale de l’aviation civile. Il lui appartiendra alors de
remettre en retour un état des inscriptions sur l’aéronef objet de la saisie pour pouvoir procéder
à la dénonciation de la saisie aux différents créanciers inscrits. La publicité se fait au minimum
3 semaines avant l’audience des criées, à l’instar des autres saisies nécessitant une vente, par
voie de différentes affiches et de publications dans les journaux prévus à cet effet et au Bulletin
officiel des Annonces commerciales. Les conditions de la vente seront alors fixées par le
tribunal judiciaire, conformément à l’article R. 123-5 du Code de l’aviation civile. A préciser
qu’à défaut d’offre d’achat jusqu’au jour de la vente, il convient alors de la reporter avec une
nouvelle mise à prix.
Actualités (mise à jour 2025)
Récemment, la question s’est posée de la saisie conservatoire d’un aéronef étranger. En
l’espèce, le juge de l’exécution avait autorisé à pratiquer une saisie conservatoire sur un aéronef
immatriculé en Grande-Bretagne et appartenant à une société de droit hongrois. Une
contestation a été élevée s’agissant de la compétence de ce juge pour autoriser une mesure
conservatoire sur un aéronef étranger. La Cour de cassation s’est elle-même interrogée et a saisi
le Conseil d’Etat d’une question préjudicielle en ce sens. Dans son arrêt du 2 février 2023 (n°
21-17.479), la deuxième chambre civile finit par affirmer la solution suivante : « Par décision
du 14 octobre 2022, le Conseil d’Etat a jugé qu’il résulte de la combinaison des dispositions
précitées, ainsi que des travaux préparatoires des lois du 9 juillet 1991 et du 22 décembre 2010,
que le législateur a conféré au juge de l’exécution une compétence exclusive en matière
d’autorisation dessaisies conservatoires, y compris en matière de saisie des aéronefs étrangers,
sous réserve de la compétence concurrente du président du tribunal de commerce prévue par
les dispositions de l’article L. 721-7 du code de commerce, dans les conditions qu’elles
énoncent, que, par suite, les dispositions de l’article R. 123-9 du code de l’aviation civile, dans
leur version applicable au litige, doivent être déclarées illégales en tant qu’elles désignent le
juge d’instance du lieu où l’appareil a atterri comme juge compétent pour autoriser la saisie
conservatoire des aéronefs de nationalité étrangère ou dont le propriétaire n’est pas domicilié
en France. Il résulte de ce qui précède que le juge de l’exécution autorise, de manière exclusive,
les saisies conservatoires portant sur les aéronefs de nationalité étrangère ou dont le propriétaire n’est pas domicilié en France, sous réserve de la compétence facultative,
concurremment reconnue au président du tribunal de commerce ».